Toutefois, force est de constater que la proportion des individus pouvant citer un domaine précis (mariage, divorce, polygamie, etc.) 33Le principe du partage des biens est appréhendé d’une manière négative parce qu’il est assimilé à une obligation arbitraire imposé à l’homme, plus particulièrement en cas de divorce. Homme/Oujda. En milieu rural, l’écart entre les femmes et les hommes qui ne savent rien sur les nouvelles dispositions de divorce n’est que d’un seul point. Si le principe de l’abolition de la tutelle matrimoniale a soulevé autant de résistances, c’est parce qu’il met directement en jeu l’autorité du père et son image au sein de la société. La dissolution du … 50Par ailleurs, à l’instar des femmes, les connaissances dont disposent les hommes sont générales et imprécises. Kamal Mellakh, « De la Moudawwana au nouveau Code de la famille au Maroc : une réforme à l’épreuve des connaissances et perceptions « ordinaires » », L’Année du Maghreb [En ligne], II | 2005-2006, mis en ligne le 08 juillet 2010, consulté le 21 décembre 2020. Le choix méthodologique inscrit donc ce travail dans une démarche à la fois quantitative et qualitative. Il semblerait que dans certains cas, les décisions judiciaires vont à l’encontre de l’esprit de la nouvelle loi12. C’est sur ce contrat que le juge doit se baser pour déterminer l’apport de chacun des deux conjoints dans l’acquisition des biens. Homme/Assila. Le nouveau Code, selon cette logique, consacrerait le pouvoir des femmes puisque désormais celles-ci peuvent empêcher leur mari de prendre une deuxième épouse. Les règles du mariage au Maroc DM Dissolution du mariage. 30Il faut rappeler aussi que parmi toutes les nouvelles dispositions du nouveau Code portant sur le mariage, celle qui a été la plus évoquée, suscitant des attitudes positives a été justement celle de l’élévation de l’âge du mariage8. Le quart de la population de l’enquête (24 %) évoque le fait qu’une législation plus restrictive s’applique désormais à la polygamie sans pour autant pouvoir en définir le contour. 26La disparition de la tutelle matrimoniale apparaît également comme une remise en cause des droits des parents sur leurs enfants. À ce titre, le tableau 4 met clairement en exergue le fait que les femmes analphabètes peuvent difficilement savoir que le nouveau Code contribue à élargir les droits des femmes. Tableau 10 : Présentation des focus groups. Derrière ce type de discours se dessine, en toile de fond, une culture féminine elle-même marquée par le poids de la société traditionnelle qui ne reconnaît pas un statut social à la femme divorcée. Retrouvez ici le code du travail Marocain 2020 à consulter ou à télécharger en format PDF. 16La connaissance des changements induits par le nouveau Code est bien évidemment particulièrement déficitaire auprès de la population analphabète. Dossier spécial : Quand l’Algérie proteste, Dossier : Genre, santé et droits sexuels et reproductifs au Maghreb, Dossier : États et territoires du politique, Dossier : Pratique du droit et propriétés au Maghreb, Dossier : Routes migratoires africaines et dynamiques religieuses. Par conséquent, notre population a tendance à développer, au nom de la défense des valeurs religieuses, un discours encombré de préjugés : - « La nouvelle Moudawwana a interdit la polygamie. Celle-ci a de plus en plus besoin d’être scolarisée avant de se marier, sans parler du fait qu’un mariage précoce porte atteinte à la santé de la femme qui n’est pas encore mature pour endosser les lourdes responsabilités que requiert un mariage : - « Dans notre temps, les filles se mariaient à 14 ans. Code de la famille au Maroc - Moudawana Texte de loi relatif à la moudawana de la famille au Maroc. Selon cette logique, il est inconcevable qu’une fille se marie sans l’accord de ses parents (et notamment le père) ou sans sa présence parce que, l’absence d’accord des parents mènera inévitablement à la faillite et au chaos du couple et de la famille. Essais d'ethnographies contemporaines, Portail de ressources électroniques en sciences humaines et sociales, Retour sur une enquête : quelques préalables méthodologiques, La connaissance du nouveau Code de la famille : une vue d’ensemble, Connaissances et perceptions du nouveau Code de la famille : les enjeux en question, Le principe de l’abolition de la tutelle matrimoniale : une résistance au nom de l’idéal de « l'obéissance due aux parents », L’élévation de l’âge au mariage : une mesure plus acceptée que rejetée, Des méfiances et des craintes à l’égard du principe de partage des biens, L’égalité et la co-responsabilité entre les époux : une innovation largement ignorée, À propos des procédures de divorce : méconnaissances, préoccupations et inquiétudes, Les nouvelles dispositions du divorce : les limites des savoirs féminins, Sur la polygamie : restrictions légales et résistances sociales, Les restrictions de la polygamie : sources d’amalgames et de résistances, Conclusion : de l’applicabilité du nouveau Code de la famille, Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International, Catalogue des 552 revues. Retour sur 2019. On notera qu’il n’existe pas une grande différence selon le sexe et le milieu des personnes interrogées. En outre, l'épouse, comme dans la. 6Il s’agit ici d’évaluer d’une manière globale le degré de ces connaissances. En effet, alors que le nouveau Code donne à la femme ayant atteint la majorité (18 ans) la liberté de désigner ou non un tuteur (la wilaya est simplement devenue facultative pour la femme majeure), les enquêtés ont plutôt tendance à ne percevoir qu’une suppression pure et dure de la wilaya. Homme/Oujda. Il lui faut juste faire une demande au juge ». Les propos des interviewés mettent aussi en exergue les limites des campagnes d’information et de sensibilisation initiées par la Télévision et à la Radio pour accompagner la mise en place du nouveau Code et garantir sa diffusion. 11  Voir à ce propos, Ligue démocratique pour les droits des Femmes, Centre d’information et d’observation des femmes marocaines, Rapport annuel sur l’application du code de la famille, Rabat 2004. Cette représentation est ponctuée de références à la morale et à la religion : l’idéal éthique et religieux est souvent invoqué pour exprimer des attitudes hostiles au nouveau Code, comme l’illustre l’utilisation dans l’un des témoignages de la notion d’Isma. Régularisation fiscale : pourquoi la DGI s’est montrée conciliante? Pour cette raison, l’islam a donné la Isma à l’homme pour mieux préserver la famille et conserver son équilibre ». 61Les fausses interprétations de la nouvelle législation sur la polygamie touchent plus particulièrement la question de l’accord de la femme. Le principe de co-responsabilité remet en cause à la fois l’image de « l’homme chef de famille », et l’inégal accès à l’autorité parentale entre les époux. Toutefois, si la tendance générale des individus interrogés dans le cadre des focus groups a été de développer un discours positif vis-à-vis de l’élévation de l’âge du mariage de la femme, on constate que les personnes interrogées ne pouvaient pas, toutes, citer l’âge légal du mariage. de l’Ambassade ou du consulat du Maroc dans l’Etat de résidence, sont à la disposition des parties pour établir ces actes. Ceci va créer des conflits entre l’homme et la femme. 54La ventilation, en fonction du genre, indique que les femmes connaissent moins bien la nouvelle réglementation sur la polygamie. Cette disposition suscite de nombreuses fausses interprétations chez les enquêtés. Toutes légitimes. », sans tenir compte du caractère pertinent de ces réponses. Polygamie : une tendance qui gagne de plus en plus de terrain au Maroc. Le principe d’égalité des droits et la co-responsabilité des deux époux n’est évoqué que par 7 % des personnes tandis que celui de partage des biens acquis pendant le mariage est complètement méconnu (1 % de la population interrogée a évoqué ce principe). التنظيم السياسي للمملكة المغربية - للتحضير لمباراة الشرطة و الامن الوطني - pdf للتحميل . DAHIR N°1.04.22 DU 12 HIJA 1424 (3 FEVRIER 2004) PORTANT PROMULGATION DE LA LOI N ° 70.03 PORTANT CODE DE LA FAMILLE *** LOUANGE A DIEU SEUL ! 10 Homme/Oujda. En revanche, en ville, il apparaît que les restrictions imposées au mariage polygame interpellent beaucoup plus les hommes (26 % contre 15 %). Cette interrogation soulevée par certains interviewés montre le poids encore important d’un discours social défensif et critique de certaines dispositions du nouveau Code de la famille. 15On note que les thèmes de la pension et de la filiation sont très peu évoqués par les répondants. Cette affirmation à caractère général vient en premier lieu. Là encore, les nouvelles dispositions du texte de loi sont mal connues (tableau 6) : 58 % des personnes interrogées ne savent rien des innovations introduites en matière de divorce par le nouveau texte. 13Le tableau 3 montre également que la proportion de la population rurale ne pouvant citer aucun point sur lequel le nouveau Code de la famille a changé est supérieure à celle de la population urbaine (respectivement 55 % et 59 %)7. En ce domaine, il n’existe pas une différence notable entre femmes rurales et urbaines. Le nouveau Code établit aussi le principe de la co-responsabilité et l’égalité des droits et des devoirs entre les deux époux, alors que, dans la Moudawwna, le mari était le chef de famille. Celle ci est souvent objet de méfiance et de préjugés, d’où la réticence de certaines femmes face au divorce, même en cas de maltraitance ou de violence conjugale. 7  Ces pourcentages décrivent le contenu des réponses à notre question ouverte « Si la nouvelle moudawana a apporté des nouveautés, précisez lesquelles ? 37La permanence des attitudes contraires à l’égalité des droits et des devoirs entre les époux découle d’une vision qui place le couple et la famille sous la coupe du mari : l’époux doit être responsable de sa femme et de ses enfants et veiller à la bonne marche du foyer. 3  Le Centre des droits des individus est une association basée à Fes. Cette enquête a visé les populations vivant dans les régions d’intervention du projet « leadership féminin », commanditaire de cette recherche1. DU CODE DE LA FAMILLE . - « Maintenant, les femmes peuvent se marier et divorcer comme elles veulent. Tableau 1 : Connaissance de l’existence du nouveau Code de la famille selon le milieu et l’alphabétisation (en %), Tableau 2 : Connaissance de l’existence du nouveau Code de la famille selon l’alphabétisation et le sexe (en %). Que dit la nouvelle loi sur ces problèmes ? Compte tenu de la complexité du Code de la famille, nous avons tenté à la fois d’appréhender le degré de connaissance des principaux points du texte et de saisir son contenu social et symbolique. Il vaut mieux qu’elle aille à l’école pour faire quelque chose de bien dans sa vie ». Tout au long de l’année 2019, des voix féminines se sont élevées au Maroc. Je connais des cas de femmes qui ne veulent plus vivre avec leur mari mais sont obligées de supporter les problèmes chaque jour parce que si elles divorcent elle n’ont rien ». C’est autour du divorce que se trouve le noyau dur des représentations masculines négatives vis-à-vis du nouveau Code de la famille. 11Si aujourd’hui son existence est mieux connue en raison de la médiatisation et de la controverse suscitée par sa réforme, il n’en demeure pas moins que la méconnaissance de son contenu est toujours importante. 45Ce type de propos montre un degré élevé des méconnaissances des procédures exactes et montre à quel point la population féminine enthousiaste et avide de nouveautés et de changements en matière d’amélioration des conditions de divorce est loin de connaître les tenants et les aboutissants des dispositions du Code se rattachant au divorce. Ministère de la Justice . 20On rappellera ici les principales modifications introduites par la réforme de la Moudawwana dans le domaine du mariage. Cette méconnaissance est plus accentuée chez les ruraux que chez les citadins (respectivement 54 % et 50 %). 23Une nette différence apparaît entre les connaissances des hommes et celles des femmes : que ce soit en milieu urbain ou rural, la proportion des femmes qui affirment ne rien savoir sur les nouvelles dispositions du Code en matière de mariage est supérieure à celle des hommes (56 % des femmes contre 53 % des hommes en milieu urbain et 49 % des femmes contre 47% des hommes en milieu rural). C’est aujourd’hui que se tient à Marrakech le troisième Forum des avocats MRE. Chekroun Mohamed, 1996, Famille, État et transformation socio-culturel au Maroc, Éd. Les enquêtes sociologiques sur la question montrent que dans l’ensemble, les Marocains perçoivent la polygamie d’une manière négative. modawanat sayr maroc. Cette affirmation concerne dans de plus grandes proportions, les femmes urbaines (27 % contre 19 % des femmes rurales). تأسس سنة 2016. L’homme, selon cette appréciation erronée, doit partager la moitié de tous ses biens avec sa femme. Pourtant, le nouveau Code, via le principe de l’égalité et la co-responsabilité, ne dispose plus que l’entretien de la femme et de la famille est du seul ressort du mari. Les interviewés n’accordent pas une place importante à la co-responsabilité dans la gestion des affaires de la famille. Voir à ce propos, Kamal Mellakh, « Le discours sur le port de voile et la polygamie », Prologues, n° 25, 2002 ; Chekroun Mohamed, Famille, État et transformations socio-culturelles au Maroc, 1996, Éd. ... الأحد, سبتمبر 08, 2019. Par ailleurs, le déficit des moyens humains et matériels alloués aux « tribunaux de famille » crées pour assurer l’application des nouvelles lois vient rendre plus difficile l’application du nouveau Code. Homme/Assila. 36Cette notion demeure largement ignorée par la population dont les attitudes laissent plutôt apparaître la prégnance d’une idéologie traditionnelle et conservatrice dans le domaine de la répartition des taches entre les époux et la gestion de la vie conjugale. Par ailleurs, les questions posées étaient, au préalable, ouvertes. Femme/Essaouira. Cette forte méconnaissance des femmes analphabètes du texte actuel réduit considérablement la portée escomptée de la promulgation du nouveau Code, à savoir l’amélioration des conditions de la femme et le renforcement de ses droits. ... 9 mars 2019. Les données de l’enquête confirment que les femmes analphabètes sont particulièrement mal informées puisque 91 % d’entre elles ne savent rien sur les modifications introduites par le nouveau Code de la famille (tableau 4). Ammor Mohammed Fouad, 2000, « Le plan d’action de l’intégration de la femme au développement », Rapport du social, n° 159, Rabat. Les pères ne peuvent plus imposer à leurs filles le mariage à cet âge. DG Dispositions générales. Je veux dire que la nouvelle réforme a des avantages et des inconvénients. 4Des focus groups destinés à donner un caractère plus qualitatif à l’étude ont été réalisés avec certaines femmes rencontrées dans le cadre de la caravane de l’égalité. Tableau 4 : Les changements introduits par le nouveau Code de la famille cités par les enquêtés selon l’alphabétisation et le sexe (en %), Changement de dispositif pour la filiation. Le rôle longtemps dévolu au père/tuteur pour la contraction du mariage de sa fille s’inscrit dans le cadre de la division traditionnelle du travail au sein de la famille patriarcale. Elle constitue aussi une incitation à une répartition égalitaire des obligations afférentes à la vie conjugale. C’est ce qu’expriment particulièrement bien les témoignages suivants : - « Je pense que le point le plus négatif dans l’actuel Code de la famille est le fait que les parents n’aient plus le droit de marier leurs enfants. Ainsi, cette approche traduit l’incapacité de certains hommes d’appréhender à sa juste valeur la portée des réformes. Le juge aux affaires familiales à Safi a prononcé un divorce pour mésentente dans le couple, en l’absence du mari. Il possède plusieurs sections locales et est actif dans le domaine de l’éducation aux droits de l’Homme et à la citoyenneté. Maintenant, les choses ont changé. Cet état de fait a été largement confirmé pendant les entretiens en focus groups.